Exemple d’une parcelle avec un désherbage non satisfaisant en 2022

Voici une parcelle (figure 1) représentative des difficultés de désherbage lors du dernier printemps. Malgré 3 traitements de post-émergence (T1, T2 et T3) et 2 binages, le résultat n’est pas satisfaisant. Plusieurs facteurs expliquent cet échec :

  • Les doses de produits à base de phenmédiphame et d’éthofumésate étaient trop faibles lors des T1 et T2. L’augmentation de la dose au T3 à 1 l/ha le 18 mai pour le produit à base de phenmédiphame est trop tardive.
  • Le délai entre le T2 et le T3 est trop long puisque 22 jours séparent ces 2 interventions.
  • Le premier binage intervenu entre le T2 et T3 n’a pas travaillé sur le rang des betteraves donc les adventices se sont développées. Le deuxième binage après le T3 n’a pas non plus eu d’efficacité sur le rang.
  • Le produit Centium (clomazone) a été positionné trop tardivement le 18 mai au T3.

Adaptation de la stratégie pour le désherbage chimique

En conditions sèches, l’ITB recommande de :

  • Augmenter les doses des produits de contact (phenmédiphame et d’éthofumésate) de 20 à 30 %.
  • Conserver les produits racinaires dans le mélange herbicide.
  • Respecter les cadences de traitement (7-8 jours entre deux).
  • Intégrer dans le programme des produits dont l’efficacité dépend peu du climat : clomazone (exemple Centium) ou triflusulfuron-méthyle (exemple Safari).
  • Augmenter la dose d’huile de 0,5 à 1 l/ha.

De plus, les traitements doivent s’effectuer avec des conditions météorologiques proches de l’optimum : absence de vent et bonne hygrométrie (supérieure à 60 %). En période sèche, c’est souvent tôt le matin que l’on trouve ces conditions.

Adaptation de la stratégie pour le désherbage mécanique

Il s’agit d’une alternative efficace aux interventions chimiques lorsque les conditions sont favorables et lorsqu’elle est effectuée au bon moment de l’itinéraire.

1/ Le désherbage mécanique entre les rangs

Le passage de la bineuse (figure 2), en complément du désherbage traditionnel, ne doit pas avoir lieu trop tôt puisqu’elle ne travaille pas sur les rangs des betteraves. Elle doit uniquement remplacer le dernier traitement chimique. Le sol doit être nivelé, ferme et la population homogène. L’absence de pluie le jour de l’intervention est nécessaire ainsi que pendant les 48 heures suivantes.

Lors de la localisation des herbicides, le binage en inter-rang est adapté aux conditions sèches.

2/ Le désherbage mécanique sur les rangs et inter-rangs

L’intérêt de travailler sur toute la surface est de commencer plus tôt qu’avec une bineuse simple, dès le stade 4 feuilles des betteraves, et ce jusqu’à 10 feuilles. Avant le premier stade, le risque est la perte de pieds ; après 10 feuilles, les machines peuvent créer des blessures sur les plantes et des pertes de population. Deux (éventuellement trois passages) herbicides en plein sont primordiaux avant ces travaux mécaniques. Les adventices doivent être peu développées (stade cotylédon maximum). Un matériel spécifique est nécessaire (houe rotative, herse étrille avec réglages des dents par ressort, bineuse équipée de moulinets ou rotoétrilles).

Ces machines nécessitent d’effectuer des réglages précis afin de s’adapter au stade de la culture et de détruire un maximum d’adventices. Si les conditions climatiques ne permettent pas l’intervention à temps, le désherbage doit se poursuivre chimiquement afin d’empêcher le développement des adventices.

L’efficacité de ces machines est faible sur les adventices vivaces et les graminées qui doivent être gérées dans la rotation et maîtrisées dans la culture par les traitements herbicides spécifiques. Concernant les graminées, le labour enfouit une grande majorité de graines en profondeur, ce qui va les rendre non viables et ainsi limiter les levées.

Enquête ITB spécifique sur le désherbage mécanique

Les conditions très sèches de ce printemps, favorable au désherbage mécanique, ont été l’occasion pour l’ITB de réaliser une enquête sur les pratiques culturales par l’intermédiaire de son site internet. Plus de 500 agriculteurs y ont participé. La figure 5 montre que la majorité des répondants ont réalisé du désherbage mécanique en 2022. Ils ont également déclaré que ces interventions concernaient 80 % de leur sole betteravière. En moyenne donc, la moitié environ des surfaces betteravières ont été binées cette année. Il est sûr que le contexte climatique a favorisé leur usage mais l’efficacité reste tributaire d’une bonne articulation entre le désherbage chimique et mécanique.

Pour ceux qui n’y ont pas eu recours, l’absence d’équipement (31 %) et le manque de temps (26 %) sont les deux premières raisons invoquées. Pour ceux ayant réalisé du désherbage mécanique, 82 % déclarent avoir utilisé une bineuse classique. Dans cette stratégie, seul le dernier traitement chimique de post-émergence peut être remplacé.

Pour les autres répondants, 16 % ont travaillé avec des équipements spécifiques (figure 6). Cette technique, qui représente une part non négligeable des pratiques selon l’enquête, a l’avantage de travailler sur toute la surface et de remplacer les herbicides sur le rang dès le stade 4 feuilles des betteraves.

Afin d’aider les agriculteurs dans leurs futures stratégies de désherbage, l’ITB organisera en 2023 une nouvelle édition de Désherb’Avenir, dans le Loiret. Les betteraves seront au centre du dispositif, mais d’autres cultures seront présentées permettant de montrer la polyvalence des machines.

Expertise : Retour sur l’enquête désherbage ITB 2022

Cette année, environ 26 % des parcelles ont été notées avec un désherbage moyen ou insuffisant (voir figure 4). Cette enquête est réalisée annuellement par les délégations régionales de l’ITB. Il s’agit du moins bon résultat depuis 2011, autre année caractérisée par un printemps très sec. Les chénopodes sont les adventices les plus fréquemment rencontrées dans les parcelles sales, mais d’autres adventices comme les atriplex, renouées liserons ou renouées des oiseaux (figure 3) ont été également difficiles à détruire cette année. Le tableau « Quelle matière active pour quelle adventice ? » du Pense-Betterave de l’ITB permet de choisir les bonnes matières actives en fonction de la flore présente dans la parcelle. Les parcelles présentant des graminées résistantes doivent également faire l’objet d’un choix de matière active diversifié.

Enlever les chénopodes avant la récolte est parfois nécessaire en 2022

Cette année se caractérise par une forte infestation de cette adventice, qui affecte la productivité de la betterave et gêne le process industriel.

Pour limiter l’enherbement, des machines de type désherbeuse à pneus (figure 7) et écimeuse, avec ou sans récupération des plantes, sont disponibles sur le marché. Ces machines sont à utiliser en dernier recours, uniquement pour faciliter les opérations de récolte et arracher ou couper les plantes avant leur grenaison. Cela limite ainsi le stock semencier pour les rotations futures (un chénopode produit entre 3000 et 20 000 graines viables pour une durée d’environ 40 ans).