Deux mois d’avance. Traditionnellement, McCain annonce aux producteurs le prix d’achat des pommes de terre début janvier, lors de l’assemblée générale du Groupement d’agriculteurs producteurs de pommes de terre pour l’industrie (Gappi). Mais face à l’incertitude de disposer d’assez de surfaces en 2023, le Gappi a avancé son AG au 17 novembre, à Bapaume. L’industriel canadien y a annoncé sa proposition de prix. Une première qui indique l’urgence de la situation. Le Gappi a d’ailleurs intitulé son AG : « les pommes de terre dans l’œil du cyclone ». Pour la première organisation française de producteurs de pommes de terre pour l’industrie (qui regroupe les 800 agriculteurs livrant à McCain dans les usines Harnes, Béthune et Matougues), les emblavements risquent de baisser considérablement. Selon son enquête (200 réponses), 40 % des producteurs veulent diminuer leur emblavement de pommes de terre, 8 % veulent augmenter et le reste garder la même surface. Et ce alors que McCain vise 19 334 ha, soit 613 ha de plus qu’en 2022.
Pour le Président du Gappi, Bertrand Achte, il faut maintenir l’attractivité de la pomme de terre et garder la rémunération des planteurs. « Depuis quatre ans, le dérèglement climatique affecte le rendement de pommes de terre. Il faut revoir le diviseur. Nous l’évaluons à 45 t/ha en irrigué et 42 t/ha en non irrigué ». Pour la campagne 2022, 287 producteurs vont passer à la commission des litiges suite à un déficit de production, soit 38 % des producteurs du Gappi. Les volumes manquent dans toutes les régions, même en secteur irrigué. Certains producteurs ont récolté uniquement 25 à 30 t/ha. L’industriel ne réclamera aucun volume. Le président Bertrand Achte estime qu’il faut une prime de risque face au changement climatique. D’autant plus que le blé a mieux résisté face à la sécheresse.
Hausse des charges
Autre souci, la hausse des charges. Certes, McCain est le seul industriel ayant octroyé une prime de 50 €/ha en 2022, mais cela apparaît insuffisant. Pour la campagne 2023-2024, le Gappi estime l’augmentation des coûts à 28 €/t hors frais de stockage en s’appuyant sur les chiffres de la chambre d’agriculture. McCain, de son côté, évalue la hausse à 24 € (4 €/t pour le plant, 8 € pour l’engrais, 3 € pour le phyto, 4,5 € pour l’énergie, 3,72 € pour le foncier et 0,35 € pour la main-d’œuvre).
Pour les hâtives, les planteurs du Gappi souhaitent obtenir une augmentation de 45 €/t, car elles sont plus sensibles au manque d’eau. Pour les autres variétés, ils demandent une augmentation de 35 % en linéaire sur toutes les semaines. Autre demande, une prime de 5 €/t pour les irriguées hâtives et une prime frigo en mai-juin pour le surcoût de l’énergie en stockage très long.
Le Gappi se félicite que, suite à ses demandes, McCain ait mis en place une nouvelle grille de tare plus favorable aux planteurs. Entrée en vigueur le 31 octobre, elle ne change pas la tare terre, mais diminue celle des pommes de terre vertes, à défauts ou à germes.
« Finalement, McCain n’est pas très loin de notre demande : 4 €/t. Mais les producteurs ne peuvent servir de variable d’ajustement. Nous continuons nos négociations », a conclu le président Bertrand Achte en ajoutant qu’à l’avenir, il aimerait transformer le Gappi en organisation de producteurs pour aller jusqu’au bout des actions.