La nouvelle Politique agricole commune (PAC) entre en vigueur le 1er janvier 2023. Le budget global a été maintenu en euros constants, mais il est en baisse si l’on tient compte de l’inflation. Le premier pilier diminue au bénéfice du deuxième, mais ce changement était déjà acté en 2021. À l’issue des négociations, combien les betteraviers vont-ils réellement toucher ?

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La conditionnalité plus forte s’accompagne d’une augmentation des DPB

L’enveloppe de financement du paiement de base (DPB) passe de 44 % à 48 % de l’enveloppe totale du premier pilier. Les montants par hectare ne sont pas connus et dépendent de l’historique de chaque exploitation. Cependant, la nouvelle PAC accentue encore un peu la convergence, en 2 étapes : en 2023 et en 2025. « Si vous êtes en dessous de la moyenne 2023, attendez-vous à ce que ça monte, et si vous êtes au-dessus, à ce que ça baisse », explique Timothé Masson, agroéconomiste à la CGB. En 2025, les DPB supérieurs à la moyenne auront diminué de la moitié de leur écart à la moyenne, dans une limite de baisse de 30%. Aucun DPB ne pourra alors être inférieur à 85 % de la moyenne française. Si la CGB estime que le montant moyen était de 114 €/ha en 2022 (123 €/ha en zone betteravière), une simulation de Chambres d’agriculture France (ex-APCA) envisage un DPB moyen à 127 €/ha en 2023 et à 128 €/ha en 2025. « Attention, les montants approximatifs qui circulent sont globalement surestimés », explique Sylvain Lhermitte, chef de service politique agricole et prospective de la Fnsea. « La répartition de l’enveloppe peut faire baisser le montant à l’hectare. Mais il est légalement beaucoup plus difficile de l’augmenter ». Comme expliqué dans le dernier numéro du Betteravier français, cette augmentation des DPB s’accompagne d’une conditionnalité plus forte.

Ecorégime : plus faibles que le paiement vert

Les écorégimes seront financés par l’enveloppe auparavant destinée au paiement vert, mais sa valeur passe de 30 % à 25 % du budget du premier pilier. Il y aura donc mathématiquement une perte d’argent sur ce volet. Concernant le montant par hectare, le flou demeure puisque, ce qui est fixe, c’est le montant de l’enveloppe globale. Plus les agriculteurs atteindront un niveau élevé d’écorégime, plus le montant/ha diminuera. « Alors que le paiement vert était jusqu’à maintenant de 89 €/ha, on peut s’attendre au maximum à 59 €/ha pour le niveau standard, à 80 €/ha pour le niveau supérieur et à 110 €/ha pour la certification bio », explique Timothé Masson. « Si le montant exact reste une approximation, le différentiel entre le niveau standard et le niveau supérieur devrait rester stable à 20 environ », précise l’agroéconomiste de la CGB. « Je recommande de viser le niveau supérieur quand c’est possible et, dans tous les cas, de ne pas faire l’impasse du niveau standard », conseille Timothé Masson. Le bonus « haie durable », disponible dans les deux écorégimes certification et diversité, apporte une valorisation supplémentaire de 7 €/ha.

Les aides couplées : un effort sur les légumineuses

L’enveloppe consacrée aux aides couplées reste à peu près la même (15 % du premier pilier). Mais la nouveauté consiste dans la progression de la part destinée aux protéines végétales. Elle passe de 2 % du budget du 1er pilier en 2023, à 3,5 % en 2027. Cette enveloppe grossira de 0,3 point par an sur toute la durée de la nouvelle PAC. On notera donc un gros effort sur les protéagineux. Autre nouveauté, les légumes secs ne sont plus exclus du dispositif. Les légumineuses à graines ou déshydratées (protéagineux, légumineuses fourragères déshydratées, semences) bénéficieront de 104 €/ha environ avec une dotation de 73 M€ en début de PAC et de 101,5 M€ en fin de PAC. Les mélanges avec des céréales sont éligibles si les graines de légumineuses représentent plus de 50 % de la semence. À noter que cette enveloppe n’est plus segmentée par production. L’aide à la culture de soja ne sera donc limitée que par l’enveloppe totale légumineuses à graines et déshydratées. Concernant les légumineuses fourragères (hors déshydratation), le montant sera d’environ 149 €/ha, avec une enveloppe dédiée aux zones hors montagne qui progressera de 64 M€ à 96 M€ au cours des 5 ans. Mais, selon la Fédération nationale bovine (FNB), ne seront éligibles à cette aide que les éleveurs d’au moins 5 UGB, ou les céréaliers ayant souscrit un contrat avec un éleveur d’au moins 5 UGB. Les aides couplées versées aux autres cultures demeurent, mais les montants et les conditions d’attribution peuvent varier (voir tableau).

Pour la première fois dans la PAC des grandes cultures, une partie de l’argent ne sera pas donnée aux agriculteurs mais à leurs organisations de producteurs, via un programme opérationnel. À partir de 2024, 23 millions d’euros seront disponibles pour les organisations et les associations d’organisations de producteurs (OP et AOP) pour le secteur des protéines végétales. 10 M€ le seront aussi pour les OP ou AOP des autres secteurs. Ces fonds seront bien sûr attribués selon des critères bien précis et dans le cadre d’un cofinancement limité à 50 %.

Enfin, le paiement redistributif (bonus accordé aux 52 premiers ha) est maintenu et sera toujours financé par 10 % du premier pilier.

Seuls les agriculteurs actifs toucheront des aides

Attention, désormais, pour toucher l’ensemble de ces aides, il faut être considéré comme « agriculteur actif ». Selon la nouvelle PAC, un agriculteur actif est tout d’abord un agriculteur qui cotise à l’Atexa (assurance obligatoire gérée par la MSA). Pour les agriculteurs du Haut-Rhin, du Bas-Rhin et de la Moselle, cette condition est remplacée par le fait d’exploiter une superficie supérieure à 2/5èmes de la surface minimale d’assujettissement (SMA) ou de consacrer au moins 150 heures à l’activité agricole. Ensuite, un agriculteur ne touchera les aides que s’il a moins de 67 ans ou, à défaut, s’il ne touche aucune retraite, y compris une retraite non agricole. Par ailleurs, une exploitation agricole dont au moins un des associés répond à ces critères pourra bénéficier des aides PAC. Pour les autres formes sociétaires, des exceptions existent : se rapprocher de la chambre d’agriculture du département. Présentation du deuxième pilier de la nouvelle PAC dans le prochain numéro.