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Lors de suivis d’expérimentations au champ, des larves et des nymphes de parasitoïdes ont été observées dans certaines galeries du charançon de la betterave, Lixus juncii. L’ITB a donc réalisé des échantillonnages de pétioles dans les régions les plus touchées par le ravageur afin de faire un premier recensement des espèces auxiliaires parasitoïdes présentes dans l’agrosystème. Sur toutes les galeries creusées par les larves de L. juncii, un tiers d’entre elles comprenaient un parasitoïde ou des traces de son passage, bien qu’il y ait une grande disparité entre sites. Les 46 spécimens de parasitoïdes récoltés appartiennent à 5 espèces différentes avec une espèces prédominante : Bracon intercessor. En plus des parasitoïdes des larves, plusieurs éléments indiquent la présence de prédateurs ou de parasitoïdes des œufs de charançon.

Les résultats présentés dans cet article proviennent d’échantillonnages réalisés au cours de l’été 2022 dans 7 parcelles fortement infestées situées dans les départements de l’Aube, du Loiret, de la Seine-et-Marne et de l’Yonne. Pour chaque parcelle, plusieurs zones ont été échantillonnées afin d’obtenir au minimum 50 pétioles avec des trous de ponte de charançons. Les pétioles ont ensuite été ouverts pour noter le devenir des œufs et des larves de charançons. Les œufs, larves et nymphes de parasitoïdes présents dans les galeries ont été récupérés et conservés pour leur permettre de terminer leur cycle de développement et faciliter l’identification de l’espèce.

Une pression de parasitisme importante

En combinant tous les sites d’échantillonnage, 280 galeries ont été trouvées en ouvrant les pétioles. Trois cas sont alors distingués selon si la larve de charançon est vivante ou non et selon si l’on trouve les traces du passage d’un parasitoïde ou non (œuf, larve, nymphe, cocon ou trou d’émergence). Les résultats indiquent qu’au moins 31 % des larves sont tuées par un parasitoïde, auxquels s’ajoutent plusieurs cas où la larve est partiellement mangée sans trace de parasitoïde ou de prédateur dans la galerie (figure 1).

Cependant, il y a une très forte variabilité entre les sites échantillonnés et le pourcentage de larves tuées par un parasitoïde varie entre 9 % et 60 %. Plusieurs éléments pourraient expliquer ces écarts. Il pourrait s’agir d’une différence de pression du ravageur entre les sites, avec un plus grand nombre de parasitoïdes présents dans les zones les plus infestées. Cependant, l’environnement local peut également jouer un rôle. Certains éléments paysagers peuvent favoriser les populations de parasitoïdes, mais il est aussi possible que les populations de parasitoïdes et leur prévalence diffèrent d’une région à une autre. Il sera donc nécessaire de reconduire cette expérience avec davantage de relevés dans ces mêmes régions pour vérifier ces hypothèses.

Plusieurs espèces de parasitoïde identifiées

En se basant sur les parasitoïdes récupérés et maintenus vivants jusqu’au stade adulte, 5 espèces différentes ont pu être identifiées (figure 2). À partir des observations des différentes espèces, il a été possible de déterminer l’espèce du parasitoïde responsable de l’attaque du charançon dans la majorité des cas, même lorsque les individus avaient émergé avant la collecte du pétiole (présence d’un cocon dans la galerie et forme du cocon).

L’espèce Bracon intercessor est la plus fréquemment trouvée avec 52 cas identifiés, suivie de Stenomalina gracilis avec 9 cas. Les autres espèces sont plus rares, ne comptant que 3 cas confirmés chacune, avec toutefois 16 attaques de parasitoïdes auxquelles aucune espèce n’a pu être attribuée (l’absence de cocon ne permet pas de distinguer entre Stenomalina gracilis et Eurytoma curculionum). Comme pour la prévalence globale des parasitoïdes, le nombre d’espèces trouvées par site fluctue et seul un site comptabilise les 5 espèces. Cependant, comme certaines espèces sont rares, il est possible qu’elles n’aient pas été échantillonnées malgré leur présence dans l’environnement.

Une pression des auxiliaires également sur les œufs

En examinant les trous de ponte du charançon à la loupe binoculaire, il est apparu que certains trous vides étaient percés d’un plus petit trou, indiquant la présence de prédateurs ou de parasitoïdes d’œufs. Cependant, aucun insecte n’a été trouvé lors de l’ouverture des trous de ponte. Les échantillonnages ayant été réalisés tard dans la période de ponte (les charançons pondent les derniers œufs en juillet), la majorité des prédations d’œufs avaient dû se terminer peu avant la collecte des pétioles. Des observations plus précoces sont nécessaires pour déterminer la diversité et le pouvoir de régulation de ces auxiliaires.

Des premières observations encourageantes

Les résultats de cet échantillonnage sont très encourageants car bien que le charançon soit arrivé récemment dans ces régions, la régulation naturelle y est déjà conséquente avec une diversité d’auxiliaires présents dans l’agrosystème. En 2022, Lixus juncii a poursuivi sa progression vers le nord ; il sera donc intéressant de considérer les zones nouvellement colonisées dans les prochains échantillonnages, afin de voir si les communautés d’ennemis naturels suivent la progression du ravageur. En identifiant les habitats nécessaires au maintien de ces communautés, il sera possible de réduire la pression du ravageur en minimisant les interventions.