Au 1er octobre 2021, les produits dont la concentration en métaldéhyde est supérieure ou égale à 3 % sont désormais classés CMR2 (cancérogènes, mutagènes, toxiques pour la reproduction). En pratique, cette mesure concerne une bonne part d’anti-limaces utilisés en grande culture, qui étaient auparavant tous dépourvus de classement. CMR2 signifie que ces produits doivent désormais être stockés en local phytosanitaire, selon des conditions fixées. Plus précisément, les appâts contenant plus de 3 % de métaldéhyde doivent être placés à part à l’intérieur du local, dans une zone ou sur une étagère séparée des produits dangereux. Le stockage en local phyto ou en local fermé est aussi recommandé pour les anti-limaces non classés, à base de phosphate de fer ou des produits à concentration de métaldéhyde inférieure à 3%.

Le classement comme produit CMR 2 a d’autres conséquences. Lorsqu’un salarié effectue l’application, l’employeur doit lui signaler qu’il utilise des produits classés CMR 2, qui nécessitent un équipement de protection. Il a aussi l’obligation de mettre à jour l’évaluation des risques. Le classement prévoit après l’application un délai plus long d’entrée sur la parcelle de 48 heures. Surtout, ce classement soumet les appâts contenant plus de 3 % de métaldéhydes à la redevance pour pollution diffuse (RPD). Au final, l’addition peut se chiffrer entre 0,27 et 0,45 €/kg de produit, soit un surcoût de 1,35 à 2,25 €/ha pour un traitement titrant à 3 % ou à 5 % de métaldéhyde.

Des formulations non classées

Pour éviter les surcoûts, il reste deux solutions : des appâts faiblement dosés en métaldéhyde (moins de 3 %) ou des appâts à base de phosphate ferrique, ou encore une association des deux matières actives, qui combinent des modes d’action différents. Deux nouvelles formulations ont été mises au point, avec une concentration faible de métaldéhyde. La formulation Techn’o Intens de Phyteurop est formulée avec 2,5 % de métaldéhyde seul, pour un coût/ha qui se situe entre 13 et 22 €/ha*. Misant sur l’association, De Sangosse développe le Metarex Duo formulé avec 1 % de métaldéhyde et 1,62% phosphate ferrique. Le coût/ha de Metarex Duo se situe entre 15 et 25 euros/ha*.

Une autre option se base sur des anti-limaces formulés à base de phosphate ferrique solo, Sluxx HP/Babbox (Certis) et Iron max pro (De Sangosse). Ces deux marques figurent sur la liste des produits de biocontrôle et sont éligibles aux Certificats d’économie de produits phytopharmaceutiques (CEPP). Ils représentent déjà 20 % des surfaces traitées en grandes cultures, pour un coût de traitement moyen entre 20 et 30 euros /ha. L’efficacité du Sluxx HP a été évaluée par Certis à 85 % à 10 jours sur le critère de la mortalité des limaces. La formulation des différents appâts à base de phosphate ferrique n’est pas neutre et joue parfois sur leur vitesse d’action. Au champ, l’efficacité peut paraître moins immédiate que celle du métaldéhyde, car les limaces ayant absorbé le phosphate ferrique vont ensuite s’enterrer.

OAD et grilles de décision

Le contrat de solutions précise bien les moyens d’anticiper l’arrivée des limaces sur une parcelle. Les réseaux d’observation, liés au bulletin de santé des végétaux ou à des réseaux privés, rediffusent généralement des informations issues de piégeages pour connaître l’activité des limaces à l’approche des semis. Le risque s’évalue avec des méthodes d’observation du ravageur, généralement des pièges demandant un relevé manuel assez long. L’observation devrait être facilitée par l’essor des pièges connectés, tels que le Limacapt (De Sangosse), à capteur autonome. Celui-ci détecte et compte les limaces aux champs, activant une caméra de surveillance infrarouge pendant la nuit quand l’activité des limaces est à son maximum. « Limacapt est actuellement en test chez des agriculteurs, sur les colzas et les semis de céréales », précise Pierre Olçomendy, chef de marché anti-limaces chez De Sangosse. Des grilles de risques peuvent compléter les résultats des observations et plusieurs outils sont déjà opérationnels sur le terrain. L’OAD Ciblage anti-limaces concerne à ce jour plus de 800 agriculteurs-piégeurs dans toutes les régions. Il permet la collecte des données de piégeage pour l’observatoire anti-limaces Ciblage, qui est consulté en ligne par des milliers d’utilisateurs. Une nouvelle application Limaxxion (Certis) basée sur les prévisions météo est aussi en cours de développement.

Protéger les jeunes colzas

Les jeunes colzas font partie des cultures les plus touchées par les limaces. Celles-ci s’attaquent aussi bien aux graines en germination qu’aux cotylédons et aux jeunes feuilles. La culture reste très sensible jusqu’au stade 3-4 feuilles. En présence de limaces dans les pièges et de météo favorable au maintien de la fraîcheur, l’application en préventif demeure la seule manière de protéger efficacement les levées du colza et d’éviter des dégâts irréversibles. Même si le sol est sec et la météo peu favorable aux limaces à la levée, il est conseillé de surveiller les jeunes colzas jusqu’au stade 3-4 feuilles. Toute arrivée de pluie peut en effet déclencher en quelques heures l’activité du ravageur.