Le dernier rapport du ministère de l’Agriculture américain a surpris tous les acteurs économiques tant les écarts se sont brutalement accentués entre l’offre et la demande, jusqu’alors parfaitement équilibrés. Du coup, tous les cours flambent. Le soja affichait 436 $/t le 1er décembre à Chicago, au plus haut depuis sept ans, avec des volumes d’achats énormes depuis début novembre. En Europe, le colza suit la même pente. Le même jour, le Fob Moselle affichait ainsi 415 €/t, après avoir franchi son niveau le plus haut de l’année, à 420 €/t la veille. Le Rendu Rouen s’inscrit à 416 € et Euronext, pour les contrats à échéance de février et mai 2021, restent un peu plus bas, respectivement à 410 et 405 €/t.

Plus spectaculaire encore, la graine de tournesol est proche d’atteindre 500 €/t, sous l’effet d’une demande accrue des triturateurs européens et d’une mauvaise récolte en Ukraine. Tous les débouchés suivent. L’huile de tournesol s’affiche à 1400 $/t à Rotterdam, l’huile de colza et l’huile de soja à plus de 1200 $/t. Il y a un mois, ces deux huiles étaient à 900 $. Les hausses valent aussi pour les tourteaux, à 400 $/t contre 300 en septembre. Plusieurs facteurs expliquent ce rebond : la sortie de la pandémie, le retour spectaculaire des importations chinoises, et surtout le début d’un déséquilibre entre l’offre et la demande mondiale.

En effet, la production mondiale de soja pour 2020-2021 a été revue à la baisse de 5 Mt à 365 Mt, pour une demande toujours estimée à 370 Mt. La récolte aux États-Unis et en Argentine n’est plus aussi importante que prévu, et celle au Brésil est menacée par la sécheresse. Du jamais vu, le Brésil, premier producteur mondial, est contraint d’importer des graines de soja des États-Unis pour satisfaire à ses besoins en biocarburants et faire la jointure avec la prochaine récolte.

Les stocks mondiaux sont au plus bas, à 45 Mt pour le soja – contre 62 Mt en 2019 – soit une chute de 21 %. Avec une production de 17 Mt de colza en Europe, le stock est inexistant et le vieux continent est contraint d’importer un volume d’environ 17 Mt de soja du Brésil et des États-Unis. Même si les marchés à terme sont moins optimistes pour 2021 que les marchés physiques, la solidité des cours semble acquise pendant plusieurs mois. Et certains estiment que les prix pourraient atteindre le pic de 2012, quand le colza se négociait à plus de 500 €/t. Ce serait la fête… de fin d’année pour les producteurs !