Les exportations ukrainiennes de sucre commencent à inquiéter les sucriers européens. Depuis juillet 2022, l’Union européenne a en effet levé l’ensemble de ses droits de douane et de ses quotas d’importation agricole en provenance de ce pays, afin de soutenir l’Ukraine dans son effort de guerre. L’Ukraine peut ainsi exporter son sucre sans limite de volume, alors qu’elle avait un quota d’importation de 20 000 tonnes par an depuis 2016.

Pour la campagne 2022-2023, ce pays aux terres fertiles a produit 1,1 Mt de sucre pour une consommation de 900 000 tonnes. Tous les mois, l’Ukraine a ainsi exporté environ 40 000 t de sucre pour atteindre en juin 2023 un cumul de 383 000 t de sucre depuis septembre 2022. L’Ukraine est ainsi devenue le deuxième plus gros exportateur de sucre vers l’UE, derrière le Brésil, avec une part de marché de 18 %. C’est un volume énorme, équivalent à la production de deux sucreries !

Ce sucre arrive essentiellement dans les pays de l’Est de l’Union européenne – essentiellement la Roumanie, la Pologne, la Hongrie et la Bulgarie – mais aussi l’Italie, un pays où la France exportait traditionnellement son sucre.

Risque de 500 000 tonnes

La filière sucre européenne, par la voix de la Confédération internationale des betteraviers européens (CIBE) et de l’Association européenne des fabricants de sucre (CEFS), a demandé à la Commission de mieux contrôler les flux de sucre. Car si l’Ukraine n’exporte plus aujourd’hui, c’est parce que le pays a décidé, le 5 juin dernier, de limiter ses exportations jusqu’au 15 septembre, afin d’assurer la fourniture de son marché intérieur. Mais les exportations pourraient reprendre pour la prochaine campagne, puisque les surfaces emblavées cette année sont en hausse d’environ 20 %. Les exportations risquent donc de dépasser les 500 000 t l’année prochaine. Une telle quantité d’exportations pourrait avoir un impact sur le marché du sucre de l’UE, craignent les producteurs. Une crainte qui n’est pas partagée par la Commission européenne puisqu’elle ne s’attend pas à une déstabilisation du marché du sucre de l’UE. « La production de sucre de l’UE est estimée à 15,5 millions de tonnes et des importations seraient encore nécessaires pour couvrir les besoins intérieurs », estime la direction générale de l’agriculture de la Commission européenne.

La Commission indique qu’elle suit attentivement ce dossier, qu’elle prévoit des mesures de surveillance du marché et pourrait activer des mesures de sauvegardes renforcées afin d’éviter toute perturbation du marché dans l’Union européenne. Il faudra en tout cas être attentif, sinon le sucre ukrainien risque de peser lourd l’année prochaine dans le bilan sucrier européen.

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