Certains comparent le projet FertigHy à un Airbus de la décarbonation de l’engrais azoté. Le consortium Fertighy rassemble en effet des acteurs européens pour un projet novateur. On y trouve le spécialiste espagnol de l’énergie solaire RIC Energy, l’entreprise d’ingénierie italienne Maire Tecnimont, l’Allemand Siemens Financial Services, le groupe de négoce agricole français In Vivo, le brasseur néerlandais Heineken et l’européen Inno. Avec FertigHy, ces entreprises visent à produire 500 000 tonnes d’engrais azoté bas carbone pour un investissement estimé à 1,3 Md €. Ce qui représente 15 % de la consommation française ou encore 50 % de besoins agricoles des Hauts-de-France. L’idée est de reproduire ensuite le modèle dans d’autres pays européens.
« Nous allons produire du Can 27, engrais azoté à 27 % associé à du calcaire (dolomie) », a expliqué le directeur du projet Thomas Habas, lors de l’AG du syndicat betteravier de la Somme, le 15 mai. Au lieu de combiner l’azote de l’air et l’hydrogène extrait du gaz naturel – recette traditionnelle de l’engrais fossile dit « gris »- le fertilisant bas carbone mise sur de l’hydrogène issu de l’électrolyse de l’eau. Il vise à décarboner l’agriculture tout en s’affranchissant de la dépendance au gaz et aux engrais russes.
Un million de tonnes de CO2 économisées
« Les engrais fossiles sont responsables de l’émission de 2 % des gaz à effet de serre (GES) mondiaux, précise Thomas Habas. Ils sont souvent produits dans des pays où les coûts sont moins élevés. Mais leurs prix sont très volatils et remettent en cause la sécurité alimentaire. L’engrais décarboné prévu diminuerait jusqu’à moins 90 % l’empreinte carbone, grâce à une source d’énergie décarbonée (nucléaire, solaire, éolienne et hydraulique). Ce qui permettra de différencier des produits à forte valeur ajoutée ».
Produit par électrolyse, il faudra une puissance de 200 MW pour l’électrolyseur dédié à la production d’hydrogène bas carbone. Cette production, prévue sur plus de 25 ans, permettrait d’économiser un million de tonnes de CO2/an.
La construction de l’usine est projetée pour 2027-2030, avec 250 emplois créés. Elle est prévue sur un site de 20 hectares à Languevoisin (plateforme coop Noriap). Un emplacement stratégique, proche du canal Seine-Nord-Europe, à proximité des autoroutes A1 et A29, avec des possibilités de transport durable et compétitif. Autre atout : la proximité d’entreprises agro-logistiques au sein de la plateforme multimodale de Languevoisin.
Reste l’inconnue du prix qui, s’il était plus stable, serait plus élevé. Suite à ce projet, le consortium prévoit d’étendre la production dans d’autres pays européens. Rendez-vous en 2030.