Le prix du blé n’a pas décollé depuis une quinzaine de jours sur le marché de Rouen. La tonne vaut toujours 180 € et des brouettes, sans perspectives de hausse à brève échéance. Selon le Conseil international des céréales (CIC), 58 millions de tonnes (Mt) de blé seront récoltées en Argentine et en Australie cet été austral, soit 3 Mt de plus qu’escompté le mois dernier.
Mi-campagne, l’offre mondiale de grains est encore plus importante qu’escomptée. Or les exportations (209 Mt) ne décollent pas.
Le cours du maïs aussi plafonne autour de 180 € la tonne à l’heure où nous écrivons le papier. L’offre mondiale est pléthorique (1 300 Mt). À l’export, la concurrence est rude et implacable. En Ukraine (31,5 Mt), où les conditions de récoltes sont difficiles, les producteurs sont fortement pénalisés par le taux d’humidité très élevé des grains récoltés, générant des frais de séchage importants. Les capacités des séchoirs sont saturées et les moyens d’acheminement des grains par camions limités, selon Ukragroconsult.
À l’est de l’Union européenne, le nouvel épisode de sécheresse observé l’été dernier ruine les maïsculteurs là encore dans l’indifférence des marchés. Or l’Union européenne est en voie de perdre son grenier à maïs.
Il y a encore quelques années, la Roumanie se disputait la place de premier pays producteur européen de maïs avec la France. En 2018, 2019 et 2021, elle en avait engrangé plus de 15 millions de tonnes (Mt). Mais depuis quatre ans, la récolte roumaine avoisine 6-8 Mt. Des épisodes de chaleurs sans précipitations expliquent cet effondrement.
Cette année, le rendement moyen est d’environ 3 tonnes par hectare. En Bulgarie et Hongrie, la production de maïs s’écroule aussi. Et les millions de tonnes de maïs produites en moins dans ces trois pays expliquent une partie du déficit de 21 Mt de l’UE.
L’orge cote 10 € de plus que le maïs
A contrario, l’orge a le vent en poupe sur les marchés. À Rouen, le prix de la céréale a gagné 15 € en six semaines. Elle vaut plus de 190 € la tonne, soit dix euros de plus que le maïs à Bordeaux. Son cours retrouve son niveau de l’an passé à pareille époque. Et selon Ukragroconsult, la hausse des prix se poursuivra dans les prochaines semaines.
Cette campagne-ci est la première excédentaire en orges depuis plusieurs années. 152 Mt seront engrangées dans le monde, soit près 10 Mt de plus que l’an passé. Cet été austral, les quelques millions de tonnes d’orges supplémentaires récoltées dans l’hémisphère sud, notamment en Australie (14,6 Mt ; +1,3 Mt) et en Argentine (5,3 Mt ; +0,5 Mt) trouveront sans peine des débouchés.
Seuls deux autres pays dans le monde ont récolté plus d’orges exportables : l’Union européenne (56 Mt, + 7 Mt) et la Russie (19,7 Mt ; +2,8 Mt) grâce à sa production en Sibérie. L’Ukraine (5,3 Mt) puisera dans ses stocks pour commercer 2,5 Mt (+0,4 Mt) avec des pays tiers.
Pour autant, « les surfaces cultivées en orges dans le monde continuent de diminuer sur le long terme, enregistrant une baisse de près de 15 % au cours des six dernières saisons », déplore Ukragroconsult. Aussi, les prochaines campagnes pourraient à nouveau être déficitaires.
Depuis le mois de juillet dernier, les ventes européennes ont explosé : 4,4 Mt de grains ont déjà été expédiées, soit 2,5 Mt de plus que l’an passé. La France en a vendu 1,7 Mt et la Roumanie, 1,8 Mt. Fin novembre, les principaux pays destinataires sont l’Arabie saoudite (970 000 t), la Chine (880 000 t), suivie par la Jordanie, la Turquie et la Libye.
Cette campagne-ci, la Turquie sera le pays appelé à accroître massivement ses importations d’orges pour pallier les dégâts générés par la sécheresse qui s’est abattue le printemps dernier jusqu’en Irak, en Syrie et en Iran.
Mais l’Empire du milieu (10,3 Mt) sera toujours en tête des pays importateurs suivi par l’Arabie saoudite (4 Mt). Outre l’Union européenne, l’Australie et le Canada seront ses fournisseurs.





