Aujourd’hui, près de 1,3 million de machines motorisées, essentiellement des tracteurs, roulent presque toutes au gazole non routier (GNR), générant 8,3 millions de tonnes de CO₂ par an, soit 18 % des émissions agricoles. Le renouvellement du parc est lent, seulement 2,5 % par an, ce qui freine l’adoption rapide de nouvelles technologies.

Face à ce défi, Axema, l’association des industriels et importateurs d’agroéquipements, a lancé une étude prospective et développé un calculateur de décarbonation. Cet outil évalue l’impact des différentes énergies alternatives sur les émissions de CO₂ et sur le surcoût d’investissement pour les agriculteurs (comme les biocarburants (HVO, e-fuels), le biogaz, l’électricité et l’hydrogène).

Des stratégies complémentaires

Les résultats montrent que chaque énergie a ses avantages et ses limites : l’HVO est immédiatement utilisable mais limité en quantité, le biogaz favorise la production locale mais nécessite des stations coûteuses, l’électricité convient aux machines légères tandis que l’hydrogène répond aux usages intensifs mais reste très cher et dépend d’infrastructures rares. Le rétrofit, qui consiste à moderniser les machines existantes, pourrait compléter la transition, mais la réglementation actuelle freine son développement.

Atteindre 43 % de réduction des émissions d’ici 2050 coûterait entre 77 et 150 milliards d’euros, soit 3 à 6 milliards par an pour les agriculteurs. Pour réussir, la filière mise sur trois leviers : réduire la consommation via l’éco-conduite et la maintenance, développer les filières et infrastructures des carburants décarbonés, et simplifier les démarches de rétrofit pour es exploitations agricoles.

Selon Axema, la transition ne repose donc pas sur une seule technologie, mais sur une combinaison d’énergies, chacune adaptée à des usages et des territoires différents.

Sept scénarios pour tracer la transition

L’étude d’Axema a modélisé sept scénarios distincts afin d’identifier le meilleur compromis entre décarbonation et coûts pour la filière.

  1. Scénario HVO : mise à niveau progressive avec les biocarburants hydrotraités. Il permet une décarbonation partielle de 35 % mais reste limité par la disponibilité des matières premières.
  2. Scénario GNR : maintien dominant du gazole, presque inchangé. Avec une faible réduction des émissions (16 %), il correspond à une option conservatrice.
  3. Scénario GNV (biogaz) : forte pénétration du biométhane (80 % du parc ciblé). Il permet une réduction des émissions significative (36 %), mais représente un investissement élevé pour les stations de ravitaillement.
  4. Scénario multi-énergies : mix équilibré de HVO, GNV, électricité et hydrogène, aboutissant à une décarbonation moyenne de 27 % et à une progression technologique réaliste.
  5. Scénario électrique extrême : électrification massive du parc (80 % du parc). Il prévoit une décarbonation de 39 %, mais un surcoût très important et des contraintes d’autonomie.
  6. Scénario électrique classique : adoption progressive de l’électricité sur les machines légères. Il s’agit du même bilan carbone que le précédent, mais avec un surcoût plus élevé.
  7. Scénario hydrogène : forte pénétration de l’hydrogène pour les machines lourdes. La décarbonation est maximale (40 %) mais les coût sont prohibitifs et le déploiement des infrastructures est limité.