Le projet Resist* a suivi l’évolution des mécanismes de résistance de l’altise d’hiver et du charançon du bourgeon terminal à l’automne, tout en évaluant l’efficacité d’insecticides comme le Minecto Gold. En dix ans, la mutation super-kdr de l’altise d’hiver s’est largement diffusée au-delà de sa zone d’origine autour de l’Yonne. Dans les secteurs fortement touchés par cette mutation, les pyréthrinoïdes perdent toute efficacité. Par ailleurs, au sein des populations de charançon du bourgeon terminal, deux mécanismes de résistance ont été identifiés : la mutation kdr et la résistance métabolique.

Face à cette situation, Laurent Ruck, ingénieur développement et responsable de l’évaluation des insecticides et du biocontrôle chez Terres Inovia, estime que le recours aux seuls insecticides n’offre pas de solution durable : « Il faut combiner tous les leviers disponibles. »

Renforcer la culture pour limiter la nuisibilité des insectes

Première action préconisée par Terres Inovia : consolider la robustesse du colza. Cela implique un sol fertile, un bon précédent et une implantation réussie à l’automne. En effet, une croissance continue et vigoureuse réduit l’impact des bioagresseurs. « Un colza poussant qui atteint 1 à 1,5 kg/m² de biomasse fraîche avant l’hiver garantit 80 % de plantes saines au printemps », précise l’expert.

En complément, l’association avec des légumineuses gélives, en plus de limiter les attaques d’insectes d’automne, favorise l’alimentation azotée, freine le développement des adventices et améliore la fertilité du sol (voir BF 1202). Certaines variétés de colza présentent également une meilleure tolérance aux larves d’altises (voir BF 1200) et une bonne vigueur de départ.

Dans cette logique de diversification des leviers, les travaux menés dans le projet Adapatcol² ont démontré qu’il est possible de détourner une partie des altises en les orientant vers des intercultures pièges. Celles-ci contiennent des crucifères comme le radis chinois ou la navette. Par ailleurs, pour lutter contre les dégâts foliaires d’altises adultes, l’Institut a évalué des alternatives aux insecticides : l’huile de paraffine, le purin d’ortie, l’azadirachtine et le bore se sont révélés inefficaces. Seuls les sels d’acides gras et le soufre montrent un certain intérêt, mais ils ne sont pas autorisés aujourd’hui en colza contre les altises.

Un seul positionnement insecticide à l’étude

L’utilisation d’insecticides doit rester un ultime recours, sur la base d’un diagnostic précis. Celui-ci prend en compte à la fois le risque agronomique (capacité de la culture à croître rapidement) et le risque insecte (stade sensible, présence du ravageur et infestation dépassant le seuil de nuisibilité). Des outils d’aide à la décision contribuent à l’évaluation du risque (https://www.terresinovia.fr/-/larve-grosse-altise-colza).

Parmi les solutions testées, l’insecticide Minecto Gold (cyantraniliprole) bénéficie ces dernières années d’une dérogation de 120 jours, sous conditions, uniquement sur les larves d’altises dans les zones concernées par la résistance super-kdr (zonage réglementaire lié à la dérogation). Les essais mettent également en évidence une bonne efficacité sur le charançon du bourgeon terminal. Une dernière année d’expérimentation pourrait confirmer l’intérêt d’un traitement unique contre les deux ravageurs. Dans les stratégies actuelles, le charançon du bourgeon terminal est généralement contrôlé si besoin par un pyréthrinoïde.

En attendant une autorisation de mise sur le marché (AMM) pour Minecto Gold, une nouvelle demande de dérogation a été déposée pour l’automne 2025, ciblant les larves d’altises.