Le rétrofit, vous en avez peut-être entendu parler, consiste à donner un coup de jeune à une machine existante : électrifier un moteur, ajouter des systèmes de précision, rendre compatible une vieille machine avec l’Isobus, ou même améliorer le confort du conducteur. Frédéric Jean, président d’EDT Bretagne, le résume bien : « le rétrofit consiste non pas à changer des composants par une pièce de rechange identique ou adaptable, mais à en profiter pour améliorer les fonctions d’une machine existante. »

Pourquoi certains font-ils ce choix ? D’abord pour l’économie. Les prix du matériel neuf n’arrêtent pas de grimper, et renouveler le parc devient un vrai casse-tête pour les Entreprises de travaux agricoles (ETA), comme pour les exploitants. Ensuite pour l’environnement. Les bilans carbone réalisés dans les ETA montrent que près de la moitié de l’empreinte provient de la fabrication et du transport des machines. Alors prolonger leur durée de vie, c’est aussi un geste pour la planète. Guillaume Legonidec, chargé des travaux agricoles et environnementaux à la Fédération nationale entrepreneurs des territoires (FNEDT) insiste : « si on veut garder sa vieille machine, il faut absolument l’améliorer. »

Les limites et risques du rétrofit

Mais attention, moderniser ses engins n’est pas sans risque. Chaque transformation peut remettre en cause l’homologation et la conformité au Code du travail, ce qui engage la responsabilité de l’employeur. Certaines pratiques, comme désactiver les systèmes de dépollution ou les codes moteur, peuvent provoquer des pannes, non prises en charge par l’assureur. Guillaume Legonidec prévient : « c’est une mauvaise solution économique. »

Et ce n’est pas fini : le rétrofit, c’est aussi un vrai casse-tête administratif. Document unique (DU) à jour, déclarations à l’assureur… Sur le papier, tout est simple. « Sur le terrain, ça peut vite ressembler à un jeu de piste ». Frédéric Jean rappelle : « une machine rétrofitée implique parfois une nouvelle homologation. » Et, à partir de 2027, le cadre européen va encore se durcir : les rétrofitteurs seront considérés comme des constructeurs, avec des obligations d’homologation et de conformité beaucoup plus strictes. Cela veut dire qu’une machine rétrofitée devra répondre à toutes les exigences de sécurité, de pollution et de responsabilité civile comme une machine neuve. Selon Guillaume Legonidec : « il faudra anticiper chaque modification et bien documenter toutes les transformations ». Pour les entrepreneurs, cela marque une rupture : moderniser ses engins restera possible, mais avec un suivi réglementaire et technique beaucoup plus exigeant, et des procédures d’acceptation strictes avant de remettre une machine sur le terrain.