En 2022, les Pays-Bas étaient le jardin de Cocagne de l’Union européenne pour produire des pommes de terre. Cette année-là, au nord de l’Europe, le climat y était clément alors que dans les trois autres pays membres du NPEG (pays producteurs nord européens de pommes de terre), les plantations souffraient de canicule et d’un manque d’eau inédits. Les récoltes de pommes de terre étaient nettement inférieures à la moyenne des cinq années précédentes (-17 % en Belgique, – 8,2 % en France par rapport à la moyenne de cinq ans). Aux Pays-Bas, 3,68 Mt de tubercules avaient été récoltées (+2,1 %). Par rapport à 2021, la production avait même crû de 13,5 % : 430 000 tonnes de pommes de terre supplémentaires avaient été produites. Et sans contrainte surfacique, les Pays-Bas auraient fait des ravages sur les marchés. Mais les agriculteurs néerlandais manquent toujours d’espace pour développer leurs activités et assouvir leurs ambitions agricoles.

Cependant, le nombre de planteurs ne cesse de baisser. Il a diminué de moitié en vingt ans. Toutes catégories de pommes de terre confondues, les 6 640 patatiers encore en activité en 2022 ont récolté 6,9 Mt (source : Centraal Bureau voor de Statistiek – CBS) cultivées sur 152 000 hectares (voir encadré).

Outre les pommes de pommes de terre de consommation, 1,8 Mt de pommes de terre féculières et 1,6 Mt de plants de pommes de terre avaient alors été produits en 2022 (les chiffres de la campagne 2023 ne sont pas encore connus).

Seules 400 000 tonnes de terre de conservation sont consommées en frais chaque année. Aussi, les trois quarts de la production de pommes de terre de conservation récoltée en 2022 ont été transformés ou exportés en l’état, en Belgique notamment (environ la moitié des 700 000 à 900 000 tonnes).

Importer pour exporter plus

Mais les Pays-Bas sont en même temps le deuxième pays d’Union européenne producteur de frites et autres produits dérivés, après la Belgique. Cependant, en disposant d’un outil industriel de transformation de près de 4 Mt, le pays est contraint d’importer 1,6 Mt (soit un tiers des quantités transformées).

Sorties d’usine, plus de 80 % de la production de frites et autres denrées dérivées sont exportées vers des pays tiers. Le reste approvisionne le marché néerlandais et européen.

Les producteurs sont confrontés à des coûts croissants en matière de carburant, de produits phytopharmaceutiques, de terrain (loyer), etc.

Mais l’industrie de transformation manque de pommes de terre. Aussi, les récentes réévaluations avantageuses des prix des contrats conclus rendent la culture financièrement très intéressante pour les planteurs. La production de plants en pâtit : les milliers d’hectares de pommes de terre de consommation cultivés en plus se font aux dépens des plants.

Or, les Pays-Bas sont le premier pays producteur de plants certifiés d’Union européenne devant la France. Et la planète compte sur eux pour être approvisionnée, car la production de plants n’attire plus !

Comme un quart de la production néerlandaise est réutilisée par les planteurs, les trois quarts (1,2 Mt) sont commercialisés certifiés (source NAK). Là-dessus, 860 000 tonnes sont exportées en Union européenne (120 000 tonnes en Belgique, 121 000 tonnes en Allemagne et 40 000 tonnes en France notamment) ou vers des pays tiers.

Les faibles quantités de plants importés sont essentiellement réexportées vers des pays tiers.

La production de pommes de terre féculières (43 000 ha) est concentrée au nord-est du pays. Les tubercules sont essentiellement transformés par Avebe, le leader de la fécule et de la protéine de pommes de terre depuis 1919.

Mais la production de pommes de terre bio n’a pas la côte aux Pays-Bas : seuls 1 500 hectares étaient dédiés à cette activité en 2022.

Manque de moyens pour être performants

La pression réglementaire dissuade les jeunes agriculteurs de s’installer. Qu’ils cultivent des plants, des pommes de terre de consommation ou de fécule, les planteurs se plaignent de la pression environnementale de la Politique agricole commune et du retrait de nombreuses substances actives, nécessaires pour protéger leurs cultures contre les ravageurs et les maladies. Les règles du verdissement de la PAC desservent aussi leurs intérêts. Bénéficier des aides Ecorégime relève parfois de l’exploit.

En ayant de moins en moins accès à des produits de protection des plantes efficaces, les planteurs de pommes de terre redoutent de ne plus avoir les moyens de produire des tubercules sains. Si les produits encore autorisés à l’avenir ne sont pas suffisamment efficaces, les planteurs seront confrontés à des agents pathogènes résistants. Mais leur développement est contraint.

A contrario, si ces mêmes pesticides « peu efficaces » ne sont plus eux-mêmes autorisés, les individus sensibles ravageront les cultures, rendant leur situation sanitaire incontrôlable.

L’épandage d’engrais est aussi très contrôlé, car les Pays-Bas disposent de nombreuses eaux de surface qui doivent être protégées.

Les nouvelles techniques génomiques (NGT) seraient très utiles pour accélérer la sélection variétale. Les planteurs de pommes de terre misent sur l’adoption, d’ici la fin de la législature, d’un nouveau règlement européen sur les organismes génétiquement modifiés pour sélectionner des nouvelles variétés de pommes de terre compatibles avec les moyens de lutte agro-écologiques appelés à se développer et les enjeux climatiques à relever.

151 000 hectares de pommes de terre en 2022

Aux Pays-Bas, 60 % des terres sont détenues par des agriculteurs à la tête d’exploitations agricoles de plus de 50 hectares, dédiées en grande partie à des productions à forte valeur ajoutée (betteraves, lin, etc.). Parmi ces agriculteurs, les revenus des planteurs sont très liés à la rentabilité des parcelles allouées à la production de pommes de terre. Plus de 80 % de la production de pommes de terre de conservation est contractualisée.

Les 151 000 hectares de pommes de terre cultivés en 2022 sont répartis entre 75 000 hectares de pommes de terre de consommation (2022-2023, CBS), 40 000 hectares de pommes de terre semences et 43 000 hectares de pommes de terre féculières. Chaque année, la superficie agricole est grignotée par l’extension des zones urbaines. Aussi, produire des pommes de terre est de plus en plus ardu.