Un intérêt du désherbage mécanique en complément de la chimie
Herse étrille et bineuse
Des essais de désherbage mécanique, associant bineuse et herse étrille, ont été conduits afin de mesurer l’efficacité de ces outils pour désherber les graminées.
La herse étrille a d’abord été utilisée en pré-levée. Ce passage a retardé la levée des betteraves en les recouvrant d’une couche de terre. Ceci a engendré une diminution de la population de betteraves de 23 % en moyenne (Aisne et Oise).
En post levée, la herse étrille a réduit jusqu’à 30 % l’infestation de graminées (figure 1). Ces résultats montrent l’intérêt de cet outil, mais son efficacité reste conditionnée par la qualité de préparation du sol, le type de sol et les conditions météorologiques. Ainsi, les résultats apparaissent variables, confirmant que la herse étrille ne constitue une solution totalement fiable qu’en complément d’un désherbage chimique.
Le binage a augmenté l’efficacité du désherbage chimique des graminées. Dans une expérimentation conduite dans l’Essonne, l’efficacité est passée de 53 % avec un traitement antigraminées foliaire à 97 %, lorsque le binage venait en complément (figure 1).
Ces essais ont été conduits dans les départements de l’Aisne (02), de l’Essonne (91), de l’Eure (27) et de l’Oise (60).
Binage intégral
Cette technique consiste à biner dans deux directions, celle du semis et en perpendiculaire. Elle a été testée en 2025 pour la première fois à l’ITB sur les graminées.
Les betteraves ont été implantées à l’aide d’un robot Farmdroid, garantissant un double alignement précis, nécessaire au passage de la bineuse.
Pour effectuer le binage perpendiculaire au semis, la densité de semis a été réduite à 80 000 pieds/ha (écartement inter-rang de 50 cm et intra-rang de 25 cm). Des betteraves ont été arrachées lors du binage en perpendiculaire, en raison de leur proximité avec les éléments de la bineuse et des zones de manœuvre.
La parcelle présentait par ailleurs une infestation de graminées très hétérogène, ce qui a rendu l’évaluation de l’efficacité du binage intégral plus complexe. Cette technique de désherbage demande donc à être confirmée.
De nouveaux essais seront reconduits dans les prochaines années afin de confirmer et de renforcer la fiabilité des résultats obtenus sur graminées.
Une localisation de l’herbicide couplée au binage permet de réduire la quantité de produits appliquée
Des essais ont été conduits afin d’évaluer l’efficacité d’une pulvérisation localisée de traitement antigraminées sur le rang de betteraves et un désherbage mécanique avec un binage sur l’inter rang. Cette combinaison vise à maîtriser l’infestation de graminées tout en réduisant la quantité de produits appliqués.
Les résultats se sont révélés concluants. Le désherbage combiné a obtenu un niveau de satisfaction du désherbage compris entre 70 et 87,5 % (figure 2), des performances tout à fait comparables à celles obtenues avec un itinéraire technique utilisant un traitement antigraminées en plein.
Le binage a éliminé la majorité des graminées présentes dans l’inter rang, même si l’efficacité n’a pas atteint les 100 %. Les premiers passages ont été réalisés à partir du stade 2 feuilles des betteraves sucrières, quand les graminées étaient encore peu développées. Pour maintenir la propreté de l’inter rang, plusieurs passages ont parfois été nécessaires, notamment parce que les graminées étaient en cours de levée.
Ces expérimentations se sont déroulées dans les départements de l’Aisne (02) et de l’Eure (27).
Des mesures prophylactiques telles que l’écimage
Dans le cadre du PARSADA*, des travaux sur les leviers prophylactiques sont également testés. C’est le cas de l’écimage dont l’objectif est de limiter l’augmentation du stock semencier pour les cultures suivantes, lors d’un échec préalable de la gestion des adventices. L’essai de 2025 a permis de réduire significativement le nombre d’épis de ray-grass dans la culture.
Cet essai a été réalisé avec une écimeuse récupératrice. Son rôle est de couper les épis de graminées situés au-dessus de la culture et de les récupérer pour les sortir du champ dans le but de diminuer le stock semencier.
L’écimage a montré une réduction moyenne de 130 épis par m², soit une diminution de 59,6 %. L’outil a donc supprimé près des deux tiers des épis dans les zones de comptage.
Toutefois, les graminées se trouvaient à un stade avancé de développement, ce qui a pu favoriser une dissémination simultanée des graines. L’analyse des données, combinée au contexte de l’intervention et aux observations visuelles, confirme que l’écimage s’avère efficace pour réduire le nombre d’épis dans ces conditions même en situation défavorable.
Malgré la maturité des graminées et la présence d’épis restés inaccessibles sous les betteraves, l’efficacité a atteint près de 60 %. Des comptages seront effectués sur les autres cultures de la rotation pour étudier l’effet dans le temps de la méthode.
Yohan Debeauvais, responsable régional Somme/Oise (ITB)
Dans notre région, la gestion des graminées est une problématique croissante. La perte progressive de solutions chimiques sur plusieurs cultures a engendré une pression de sélection de graminées résistantes et une augmentation des populations de graminées. La culture de la betterave est concernée depuis cette année, suite au retrait de l’Avadex et du Mercantor Gold, ressources essentielles pour combattre le vulpin et le ray-grass.
Pour pallier ce manque, divers leviers agronomiques ont été mobilisés. Les essais menés confirment qu’une combinaison de faux semis et de désherbage mécanique (herse étrille ou binage) avec les solutions chimiques restantes permet d’améliorer l’efficacité. Cependant, les résultats restent variables selon les conditions (climat, stade des adventices, etc.). Cette approche requiert une réactivité et une technicité accrues de la part des agriculteurs afin de préserver le potentiel de rendement.
Ces solutions alternatives ont une réussite non garantie et peuvent entraîner une augmentation des charges de mécanisation, avec un risque de perte de productivité en cas de mauvaise maîtrise des techniques. Il est crucial d’accompagner les agriculteurs dans cette transition.
Les projets Gramicible et Gramicombi ont pour objectif de développer des stratégies de gestion des graminées afin d’anticiper le retrait potentiel de substances actives herbicides dans les grandes cultures. Menés en collaboration avec de nombreux partenaires, dont l’ITB chargé des essais sur des parcelles de betteraves sucrières, ces projets s’intègrent dans les programmes du PARSADA*.
Le projet Gramicible, porté par Arvalis, vise à développer des solutions de lutte directe et à déployer leur gestion intégrée. L’ITB est impliqué dans la réalisation de cartes des graminées problématiques et de leur résistance, dans des expérimentations de pulvérisation ciblée et localisée, et de désherbage mécanique dans les betteraves sucrières.
Le projet Gramicombi, porté par Terres Inovia, se positionne sur des actions de mesures prophylactiques et le déploiement de combinaisons de leviers pour la gestion des graminées. L’ITB est impliqué dans l’évaluation de matériels d’arrachage ou d’écimage, dans l’étude du faux semis couplé au désherbage mécanique et dans le déploiement de réseaux d’agriculteurs mettant en place de nouvelles combinaisons de leviers.
Les essais ont débuté en 2025. Les travaux se poursuivront jusqu’en 2027 pour Gramicible et jusqu’en 2029 pour Gramicombi.
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*Plan d’action stratégique pour l’anticipation du potentiel retrait européen des substances actives et le développement de techniques alternatives pour la protection des cultures.
Baptiste Le Roux, coordinateur projets PARSADA (Inov3PT)
La maîtrise des graminées sur la culture de pommes de terre est aujourd’hui rendue plus complexe par le développement de résistance aux familles chimiques employées dans la rotation du ray grass et vulpin, et par l’efficacité limitée des solutions de pré et post levée.
Aujourd’hui, plusieurs outils de désherbage mécanique existent pour les pommes de terre plantées en butte : herses étrille, bineuses et buttoirs/scalpeurs. En revanche, pour les pommes de terre plantées en billon (technique de plantation qui représente plus de la moitié des surfaces en plants de pomme de terre), des outils de désherbage mécanique restent en cours de développement. Adaptés des buttoirs, des prototypes sont en cours de test par le comité Nord et Bretagne Plants Innovation pour évaluer leur efficacité sur graminées. Ces outils associent des couteaux ou socs et un élément de herse étrille afin de désherber la totalité du billon et de l’inter billon. Une cape présente sur l’outil vient ensuite reformer le billon. Les premiers résultats d’efficacité sont prometteurs. Le projet Gramicible permettra de les évaluer pendant trois ans dans diverses conditions.





