La forme de la courbe en elle-même. L’évolution du rendement du blé tendre en France de 1815 à 2024 comporte trois périodes bien marquées. Cette courbe réalisée par l’Académie d’agriculture de France sur une période longue de deux siècles met en perspective le rendement catastrophique de 2024 qui, avec ses 62 q/ha, nous ramène au milieu des années quatre-vingt.

Avant de livrer son analyse, l’Académie d’agriculture rappelle une opinion répandue selon laquelle « l’abandon des moyens mis au service de la production après 1950 tels que les variétés modernes, les produits de synthèse, etc… n’aurait que peu de conséquences sur la productivité du blé tendre. »

Or, la simple lecture de cette courbe de rendement montre qu’il y a eu une progression régulière mais modeste du rendement moyen national du blé entre 1815 et 1940, qui est passé de 8-10 q/ha avant 1850 à 12-14 q/ha avant 1945. « L’essentiel de cette progression est attribuable à la mécanisation des tâches, à l’amélioration des machines, à l’introduction de variétés sélectionnées, d’engrais et d’amendements minéraux », explique l’Académie.

Entre 1945 et 1995 environ, le rendement moyen des blés français a connu près d’un demi-siècle de hausse continue, passant de 14-15 q/ha à plus de 70 q/ha ! « On peut rattacher cette progression considérable à la génétique qui bénéficie d’un emploi cohérent des fertilisants, des produits de protection (herbicides, fongicides et régulateurs en particulier) et du perfectionnement des méthodes de travail du sol, de semis ou de moisson. »

Enfin on perçoit une nette coupure depuis la fin des années quatre-vingt-dix avec de fortes irrégularités, qui « semblent reliées à une certaine désintensification résultant d’une économie d’intrants (réduction de 15-20 % des apports azotés, des fongicides, moindre travail du sol…) et du changement climatique (fortes températures au remplissage du grain, faible luminosité, pluviométrie excessive…). »

Conclusion de l’Académie : « on doit s’interroger sur l’impact que pourrait avoir sur la productivité un abandon des variétés de blé modernes et des produits de synthèse, ce qui pourrait conduire à rendre rapidement notre pays dépendant des importations, situation qui prévalait avant 1950. »